Illustration d'une ruche pour évoquer les idées reçues sur l'installation de ruches pour préserver les pollinisateurs sauvages
©Damien Tupinier
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Faut-il installer des ruches pour préserver les pollinisateurs sauvages ?

Face à l’effondrement des insectes pollinisateurs et plus largement de la biodiversité, l’installation de ruches est souvent présentée comme un moyen de préservation des pollinisateurs, voire de la biodiversité. Qu’en est-il ?

Les ruches n’hébergent qu’une seule espèce d’insecte pollinisateur : l’abeille mellifère (Apis mellifera). Domestiquée par l’Homme pour son miel, elle a été sélectionnée pour ses capacités de production exceptionnelles, au même titre que d’autres animaux domestiques. Comme eux, elle est logée, soignée, déplacée et parfois nourrie en cas de manque de nourriture.

Elle seule sera donc favorisée par l’installation de ruches. Or, il existe près de 1000 espèces d'abeilles et des milliers d'autres insectes pollinisateurs comme les papillons de jour et de nuit, mouches, hannetons, scarabées, fourmis, guêpes…

Malgré ses performances, elle ne peut remplir à elle seule les fonctions de l’ensemble des insectes pollinisateurs avec lesquels elle cohabite et qui assurent la reproduction de près de 90 % des plantes à fleurs à l’échelle mondiale1 et des trois quarts de notre alimentation.

1 espèce 
sur près de 1000 espèces d'abeilles
Photo de ruches plaçées côte à côte

©Rémi CHABERT_CC BY SA 4.0

La multiplication de ruches dans une même zone peut créer une concurrence entre les abeilles domestiques et sauvages, au détriment de ces dernières. Plusieurs études montrent qu'au-delà de 4 à 6 ruches au km2l'activité pollinisatrice des espèces sauvages est perturbée : compétition alimentaire, transmission aux abeilles sauvages de parasites et maladies, modification des communautés végétales (en favorisant certaines espèces aux dépens d'autres)…

Par ailleurs, une haute densité en abeilles domestiques déclenche une compétition pour les ressources alimentaires, ce qui résulte en une diminution de la présence des abeilles sauvages (-55%) et de leur recherche de nectar (-50%), mais diminue aussi la récolte de nectar (-44%) et de pollen (-36%) pour les abeilles domestiques elles-mêmes, et ce sur un rayon d'environ 1 km. Enfin, une faible densité de ruches au sein d'un rucher augmente significativement la production de miel et réduit le risque de mortalité hivernale par rapport à une forte densité2.

Alors que faire ?

Les abeilles domestiques et sauvages ont pourtant leur place côte à côte, en ville comme en zone rurale

Comment faire pour qu’elles puissent coexister ? Il est nécessaire de privilégier la mise en place d’actions bénéfiques aux abeilles sauvages comme domestiques, et aux pollinisateurs plus largement : offrir de la nourriture et des refuges à tous les pollinisateurs en laissant de la place aux plantes sauvages, en diversifiant les aménagements (prairies, haies, bosquets, bois mort…), en végétalisant massivement partout où c'est possible.

 

(1) IPBES (2016) : Résumé́ à l’intention des décideurs du rapport d’évaluation de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité́ et les services écosystémiques concernant les pollinisateurs, la pollinisation et la production alimentaire. S. G. Potts, V. L. Imperatriz-Fonseca, H. T. Ngo, J. C. Biesmeijer, T. D. Breeze, L. V. Dicks, L. A. Garibaldi, R. Hill, J. Settele, A. J. Vanbergen, M. A. Aizen, S. A. Cunningham, C. Eardley, B. M. Freitas, N. Gallai, P. G. Kevan, A. Kovács-Hostyánszki, P. K. Kwapong, J. Li, X. Li, D. J. Martins, G. Nates- Parra, J. S. Pettis et B. F. Viana (eds.). Secrétariat de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité́ et les services écosystémiques, Bonn, Allemagne. 36 pages. 

(2)  Dynes TL, Berry JA, Delaplane KS, Brosi BJ, de Roode JC (2019) Reduced density and visually complex apiaries reduce paraite load and promote honey production and overwintering survival in honey bees. PLoS ONE 14(5): e0216286. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0216286s

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